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Bilan mitigé de la politique agricole actuelle
En 2014, la Confédération a remanié en profondeur la politique agricole et a introduit un nouveau système des paiements directs, axé sur des objectifs constitutionnels concrets. Elle a ensuite reconduit ce système jusqu’en 2021 en ne lui apportant que quelques ajustements mineurs. Avant d’engager un nouveau débat de fond sur la politique agricole, une analyse du statu quo semble de mise. Pour ce faire, l’Union suisse des paysans a mis en place un dispositif de suivi permanent. Elle en tire un bilan mitigé.
La Confédération a reconduit, sans changements notables, la Politique agricole 2014-17 pour la période 2018-21. Le nouveau système des paiements directs en vigueur est axé sur des objectifs constitutionnels concrets : la sécurité de l’approvisionnement, la biodiversité, le paysage cultivé, la qualité du paysage, la promotion des systèmes de stabulation particulièrement respectueux de l’environnement et des animaux, ainsi que l’utilisation efficiente des ressources. D’où la nécessité, avant de vouloir ajuster une nouvelle fois la politique agricole, d’évaluer la réalisation des objectifs dans le système actuel. Pour ce faire, l’Union suisse des paysans (USP) a mis en place un dispositif de suivi permanent (voir le rapport distinct, en particulier le tableau 7). Il en ressort que les objectifs en matière de biodiversité ont non seulement été atteints, mais même dépassés de 140 % si l’on s’en tient à la surface. Les améliorations visées dans le domaine du bien-être animal se sont aussi concrétisées. Elles se sont toutefois traduites par des corollaires négatifs au niveau des exigences d'utilisation efficiente des ressources. En effet, les nouveaux modes de détention des animaux provoquent davantage d’émissions d’ammoniac. Ces nouveautés ont réduit à néant les progrès accomplis pour réduire ces émissions, si bien qu'aucune avancée quantitative n’est constatable dans ce domaine.
Le tableau s’assombrit encore un peu plus pour l'objectif de la sécurité de l'approvisionnement : l’énergie produite a diminué, et les pertes de terres cultivables se sont poursuivies à un rythme de plus de 1000 hectares par an. Il en va de même pour les objectifs socioéconomiques : malgré une amélioration minime de la productivité du travail et du revenu sectoriel, les revenus dans l’agriculture restent bien en deçà des revenus comparables. L’évolution de l’indice de la qualité de vie se révèle donc décevante : le retournement de tendance se fait toujours attendre. La satisfaction des familles paysannes est encore loin d’aller pour le mieux.
Alors comment continuer à partir de 2022 ? Dans son évaluation, l’Office fédéral de l’agriculture décerne de bonnes notes à la politique agricole actuelle. Pour l’USP, il n’est pas non plus nécessaire de revoir de fond en comble le système. Cela occasionnerait d’ailleurs un énorme travail et des dépenses considérables pour toutes les parties prenantes. Il n’empêche que certains ajustements s’imposent : en matière de biodiversité, la politique agricole actuelle prévoit suffisamment d’incitations, voire trop si l’on s’en tient aux surfaces. C’est pourquoi il faudra davantage mettre l’accent sur la qualité de ces surfaces à l’avenir. L’encouragement de la production alimentaire et, partant, de la sécurité de l’approvisionnement se révèle insuffisant. Il faudra rapprocher le volet du bien-être animal de la question des émissions d’ammoniac à l’avenir. Avant tout, cependant, force est de constater que la réforme en cours n'apporte pas les leviers suffisants pour améliorer la situation économique des exploitations. Cela tient notamment à la création d’incitations qui ne débouchent ni sur de la valeur ajoutée, ni sur de meilleurs revenus.
Francis Egger
Directeur adjoint Union suisse des paysans
Département économie, formation et relations internationales
Téléphone 079 280 69 66
Email francis.egger@sbv-usp.ch
François Monin
Union Suisse des Paysans
Responsable Politique agricole
Téléphone 079 559 78 66
EMail francois.monin@sbv-usp.ch